Misandrie, un cri d'amour

Je me revendique misandre, c'est même mon pseudo sur ce blog. Mais si j'y ai adjoint "tendre", c'est bien qu'il y a une raison. Ma misandrie est un mélange de colère, de tristesse et d'amour.
Un cri de désespoir. Et un espoir en même temps. Une manière de conjurer le sort.

J'ai un coeur énorme, et il y a de l'amour dedans pour beaucoup de monde, même des hommes. Et même pour des hommes qui font des trucs violents et pas glorieux. Parce qu'en fait, des hommes qui font des trucs violents et pas glorieux, y en a jusque dans ma famille, jusque dans ma fratrie. Et que je ne suis pas capable de ne plus aimer mon frère, avec qui j'ai grandi, qui m'a soutenue dans des moments difficiles, dont je connais le fond généreux et sensible.

Et aimer des hommes qui ne font rien pour changer, ça fout le blues. Ça rend misandre, justement.
Je crois que ma misandrie, c'est de l'amour contrarié. De l'amour non réciproque. Qui s'est transformé en rancoeur, en colère, en rage même parfois.

Cette colère s'est nourrie de mes expériences personnelles foireuses, de mes lectures, de mes discussions, des stats.
Et cette colère est salutaire. Elle me permet de poser mes limites, de respecter mes besoins, de m'imposer quand c'est nécessaire, et d'échapper à pas mal de violences sexistes. Des viols, j'en ai évités plusieurs dans ma vie, et c'est ma colère qui m'en a préservée. Car au lieu d'être figée, je me suis révoltée à l'intérieur, et cela m'a aidée à avoir les bons réflexes.

Aujourd'hui, j'arrive à un stade où je n'ai plus grand chose à prouver aux hommes. Je ne cherche plus leur approbation. De par mon métier, j'ai accès à leur intimité. Ils me confient leurs doutes, leurs complexes, leurs difficultés de couple, de sexe, de relation avec les femmes. Maintenant que j'ai gagné en estime de moi-même, que j'ai conscience de mes capacités, de ma puissance et de mon intelligence, je vois à travers eux. Je vois beaucoup de complexes, de manque d'assurance masqué par une virilité outrancière, de difficultés psychiques dues à une sensibilité qui n'a pas le droit d'exister. Et en toute honnêteté, j'en arrive à avoir plus de peine pour eux que d'agacement. Je vois chez certains des trésors de douceur, une soif d'amour jamais étanchée, un étonnement à pouvoir se dire, à pouvoir faire confiance, lorsque je leur propose un espace de parole sans jugement.

Et je me dis : mais quel gâchis !
Tout ce monde pourri, pour ça ?
La solution paraît si simple, et pourtant titanesque.
Car la masculinité telle qu'elle est construite, empêche même d'aller vers la solution.
La solution c'est de s'ouvrir, c'est d'accepter l'aide et le soutien pour grandir, d'accepter d'etre vulnérable devant l'autre. Tout ce qui est interdit pour les hommes, et qu'ils refusent copieusement de faire.
"La thérapie ça sert à rien"
"J'ai pas besoin d'aide"
"Je gère"
"T'inquiète c'est pas si grave"
Etc...

Bref.
Je les aime et je les déteste à la fois.
C'est ça, ma misandrie.
C'est une forme de protection contre mon propre amour. Parce que putain, la plupart du temps, ils sont difficiles à supporter. Et d'ailleurs, j'en ai peu parmi mes ami·e·s. J'en ai exactement 2, 3 si on compte une personne chère à mon coeur mais qui ne souhaite plus être dans ma vie. Les hommes que je côtoie, je leur donne tout l'amour, la tendresse, l'écoute, le non-jugement et la douceur dont je suis capable. Gratuitement pour ces 2 ou 3 et contre rémunération pour les autres. Eh oui. Sinon la plupart du temps ils n'ont aucune conscience de la valeur de mon empathie, et surtout, surtout, ils ne donnent quasiment rien en échange.

C'est comme ça que je me réconcilie avec l'amour des hommes qui est en moi : je le donne, volontiers, et j'espère ainsi changer un tout petit peu la donne, proposer un espace de changement à des hommes qui renâclent à l'idée de voir un·e psy mais qui par contre, veulent une vie sexuelle, veulent des orgasmes, veulent une forme de connexion, et qui ont conscience qu'ils ne savent pas trop s'y prendre sur ce plan et cherchent à être guidés.

Les hommes pensent pouvoir régler tous leurs problèmes par le sexe, et moi, je suis là, sur leur chemin, et je tente de hacker un peu ce réflexe en proposant du sexe féministe sans qu'ils sachent que ça en est :)

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