Relation hétéro et travail relationnel (2)

Dans mon premier billet consacré au travail relationnel, j'ai parlé des manières différentes de relationner selon le genre (et encore une fois je le répète, cela peut bien sûr dépasser des questions de genre, on est pas non plus des robots).

Dans celui-ci, je souhaite parler plus précisément de ce qu'est, concrètement, le travail relationnel, selon moi.

Et comment je n'ai eu de cesse, dans ma relation hétéro actuelle, de le visibiliser, et d'exiger qu'il soit partagé équitablement. J'en suis à un stade de ma vie où, il n'est plus acceptable pour moi d'être en relation avec un homme et que ce soit moi qui me tape tout ce boulot. Je préfère encore ne pas avoir de relation amoureuse.

On me crie "trouve-toi une meuf !" dans l'oreillette. Oui oh bah j'ai pas l'impressoin que c'est si simple que ça non plus pour ce que je vois autour de moi. Pis je suis pas contre. Mais j'habite dans le trou du cul du monde. Bon, revenons-en à nos moutons.

Je compare assez facilement le travail relationnel, au travail domestique. Si on prend l'exemple de la pile de linge qui s'accumule dans la salle de bain, sans que l'homme de la maison ne la voit grandir, et que soudainement, quand sa meuf lui fait remarquer que "eh, y a une pile de linge qui s'accumule, et c'est tout le temps moi qui fais en sorte qu'elle disparaisse et finisse propre et pliée dans les placards", celui-ci tombe de haut "il n'avait rien vu", eh ben le travail relationnel, c'est aussi indispensable que de mettre le linge à laver. Si les problèmes, les frustrations, le manque de communication s'accumulent dans un coin, ça finit par être la crise. Et oh suprise ! C'est souvent la meuf qui en premier, voit et subit le manque de discussion et d'entretien de la relation. Du coup, c'est aussi elle qui a tendance à pointer du doigt les problèmes. Plus ou moins subtilement, plus ou moins sainement, selon sa maturité affective, selon les réponses qu'elle reçoit en face, etc.

En quoi consiste le travail relationnel, concrètement ?

  • primo, avoir une vision globale de la relation, que l'on peut comparer à avoir une vision globale de la maison : savoir comment fonctionne la machine à laver, où est le linge sale des uns et des autres. Dans le cadre de la relation, ça revient à avoir conscience des mécanismes relationnels : un·e telle est plutôt fuyant·e, l'autre plutôt colérique. Bidule ne va pas bien en ce moment et ça a tel impact dans la relation, etc... En gros, avoir conscience, plus ou moins précisément, de où on en est, et des problèmes qui se présentent.

 

  • deuxio, c'est mettre les problèmes sur la table pour en discuter. Et ce n'est pas parce que c'est toujours la même personne qui fait ça, que c'est d'elle que viennent les problèmes. Dans une relation, il y a deux personnes, donc, en général, si insatisfaction il y a, ça parle d'une dynamique relationnelle, et pas d'une seule personne.

 

  • tertio, c'est réfléchir à des solutions, des aménagements. Dans la version très féminine de ce point, c'est carrément anticiper les réactions de l'autre et s'y sur-adapter. Mauvaise idée, très mauvaise idée.

 

  • quarto, c'est, une fois une solution mise en place, en faire un bilan, rediscuter, réévaluer les besoins de chacun·e, voir si ça marche ou s'il faut modifier un peu le truc

Bon voilà à peu près comment je vois les choses. Je ne prétends pas avoir une définition exhaustive ni super exacte. Mais ça donne une idée. D'ailleurs, si tu veux compléter, n'hésite pas à poster un commentaire, je serai ravie qu'on ajoute de l'eau à mon moulin, j'ai trouvé assez peu de ressources sur cette question, peut-être que je n'utilise pas les bons mot-clés.

Etant donné l'éducation genrée différenciée que l'on nous colle sur le dos dès la naissance voire même avant, et accessoirement nos cassseroles émotionnelles qui nous font souvent choisir un·e partenaire avec qui reproduire des situations merdiques mais connues, la relation amoureuse demande souvent beaucoup d'ajustements, beaucoup de communication, pour que ça se passe bien.

Bon, par contre si l'un·e des deux est maltraitant·e, la communication n'y changera rien hein, là il faut trouver un endroit sécure et se barrer.

Bref, une fois le travail relationnel à peu près défini, j'ai explicitement dit à mon amoureux qu'il allait falloir le partager. Il a flippé. Je sais pas pourquoi, les mecs commencent toujours par flipper quand on leur met sous le nez un truc qu'ils n'avaient pas conscientisé avant. Alors que, franchement ? Y a pas de quoi. Discuter de la relation, c'est super enrichissant, ça permet de se sentir plus proche l'un·e de l'autre, de prendre soin, d'éviter le passif-agressif. Et quand on le fait suffisamment régulièrement, ça évite les crises.

Bon. Pour moi, ça a mis 6 mois entre le moment où j'ai évoqué le truc, et le moment où j'ai quasiment forcé l'amoureux à ce qu'on trouve une solution pour que ce soit équitablement partagé. Il me paraissait indispensable de le formaliser, comme les tours de ménage, car en gardant ce travail informel, on sait sur qui ça retombe. Et, enfin, il s'est saisi du sujet et a proposé 2 discussions par mois, dont une des deux, en partant d'un support (podcast féministe, brochure, film, etc...), et l'autre, en mode "bilan" (météo, besoins, désirs, frustrations, peurs...). Et ce serait chacun·e sont de préparer la discussion et proposer une date. Ce jour-là, j'ai failli crier "Alleluïa" !

En faisant cela, j'ai découvert une nouvelle sérénité dans la relation, que je n'avais jamais vécue avant. Je n'avais plus besoin de ruminer seule dans mon coin car je savais qu'il y aurait un espace pour discuter, qui ne serait pas systématiquement à mon initiative. Ça y est, enfin, les discussions arriveraient avant que ce soit moi qui pointe du doigt les problèmes, et vu le format, ça voulait dire qu'enfin, le mec serait obligé de se poser la question de comment il se sent dans la relation et de le verbaliser.

Est-ce que ça fonctionne ?
Franchement, oui et non.
Passé la peur des débuts, l'amoureux a trouvé ça super (ouf!).
Mais pour diverses raisons liées à lui principalement, les discussions ont été de plus en plus décalées. Est-ce que j'en ai été étonnée ? Franchement, non pas vraiment. Je savais que c'était une des possibilités. Je n'en ai pas moins été un peu déçue, et un peu découragée.

C'est un des éléments qui m'a amenée à une n-ième crise relationnelle liée à son manque de disponibilité, et à une nouvelle répartition des tâches relationnelles, dont je parlerai dans le troisième billet sur le sujet.

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